Les conditions de l'adoption
Pour être possible, l'adoption doit se dérouler dans un cadre strictement défini, qui permet de répondre principalement aux questions suivantes : qui peut adopter ? Quels sont les enfants adoptables ?
En droit, l'adoption est possible par une personne seule ou par un couple à condition qu'il s'agisse de personnes mariées entre elles. En fait, étant donné le faible nombre d'enfants adoptables en comparaison des demandes importantes d'adoption, l'administration donne le plus souvent la priorité aux couples mariés.
Le fait pour le ou les adoptants d'avoir déjà des enfants, quelles que soient la nature de leur filiation et la forme d'adoption choisie, n'empêche pas l'adoption.
Aucune condition d'absence de parenté ou d'alliance entre le ou les adoptants et l'adopté n'est exigée. Ainsi, la jurisprudence admet sans difficulté l'adoption entre tante ou oncle et neveu ou nièce. Toutefois, l'exigence d'un âge plus élevé de l'adoptant vis-à-vis de l'adopté interdit de concevoir certains liens de parenté ou d'alliance et plus généralement, l'adoption étant prononcée dans le seul intérêt de l'enfant, les tribunaux peuvent la refuser si le lien en cause est de nature à nuire à ce dernier.
Le ou les adoptants doivent avoir 15 ans de plus que les enfants qu'ils se proposent d'adopter. Cette condition est exigée car l'adoption crée un lien de filiation qui ne serait pas crédible si la différence d'âge était moindre. Toutefois, cette différence est réduite à 10 ans lorsque l'enfant adopté est celui du conjoint.
L'adoption de l'enfant de son conjoint
Si votre conjoint a eu d'un précédent mariage (ou hors mariage) un enfant avec une autre personne que vous-même, vous pouvez, sous certaines conditions, adopter cet enfant. L'adoption simple n'est soumise à aucune condition particulière autres que celles prévues en la matière alors que l'adoption plénière est en revanche plus limitée.
En effet, même si la condition relative à l'âge minimum de l'adoptant (28 ans) n'est pas exigée, l'adoption plénière de l'enfant du conjoint n'est permise que dans les trois situations suivantes :
- lorsque l'enfant n'a de filiation établie qu'à l'égard de votre conjoint (l'autre parent n'a par exemple pas reconnu l'enfant ou a exercé une action en justice visant à effacer tout lien de filiation à son égard;
- lorsque l'autre parent que votre conjoint s'est vu retirer totalement l'autorité parentale;
- lorsque l'autre parent que votre conjoint est décédé et n'a pas laissé d'ascendants au premier degré (grands-parents de l'enfant) ou lorsque ceux-ci se sont manifestement désintéressés de l'enfant. Cette limitation s'explique par les effets de l'adoption plénière qui rompt tout lien juridique entre l'adopté et sa famille d'origine et vise ainsi à maintenir un tel lien avec elle et en particulier avec les grands-parents de l'enfant (Code civil, Art. 343-2 et 345-1).
L'agrément n'est pas nécessaire pour adopter l'enfant de son conjoint.
Pour pouvoir adopter un enfant ayant la qualité de pupille de l'État, un enfant remis à un organisme autorisé pour l'adoption ou un enfant étranger, vous devrez avoir obtenu un agrément préalable. Cet agrément est départemental ; pour l'obtenir, il faut s'adresser aux services de l'aide sociale à l'enfance du département de résidence. Toutefois, si vous changez de département, l'agrément demeure valable, sous réserve d'une déclaration préalable adressée au président du conseil général de votre nouveau département (Code de l'action sociale et des familles, Art. L. 225-2 et s.).
En outre, si vous avez obtenu l'agrément, vous devez confirmer au président du conseil général de votre département de résidence, chaque année et pendant toute la durée de validité de l'agrément, que vous maintenez votre projet d'adoption.
L'agrément est accordé par arrêté pour 5 ans, dans un délai de 9 mois à compter de la date à laquelle la personne confirme sa demande d'agrément, par le président du conseil général. L'agrément est délivré pour l'accueil d'un ou de plusieurs enfants simultanément. Une notice, établie selon le modèle figurant à l'annexe 2-6 du Code de l'action sociale et des familles, décrivant le projet d'adoption des personnes agréées est jointe à l'agrément.
L'agrément est caduc à compter de l'arrivée au foyer d'au moins un enfant français ou étranger, ou de plusieurs simultanément.
À noter :
Dans les 2 mois qui suivent le dépôt de leur demande d'agrément, une information complète sur l'adoption (dimensions psychologique, éducative et culturelle de l'adoption, procédure…) doit être délivrée aux demandeurs.
Avantage :
En plus des congés prévus en matière d'adoption, les personnes qui obtiennent un agrément et qui sont salariées peuvent bénéficier d'un congé non rémunéré, d'une durée maximum de 6 semaines par agrément, pour se rendre à l'étranger, dans les DOM ou les TOM, en vue de l'adoption d'un ou plusieurs enfants. L'employeur doit être informé de cette absence, et de sa durée prévisible, au moins 2 semaines avant le début de ce congé (Code du travail, Art. L. 122-28-10).
À noter :
L'adoption des enfants étrangers peut également être réalisée par l'intermédiaire d'organismes autorisés pour l'adoption. Les conditions et les effets de l'adoption sont régis par la loi nationale des adoptants alors que les conditions dans lesquelles le consentement à l'adoption doit être donné et les personnes habilitées à le faire sont soumises à la loi nationale de l'enfant adopté. Un agrément préalable est exigé du ou des futurs adoptants. De plus, une convention internationale signée par la France sera dans certains cas applicable.
L'adoption par une personne seule
L'adoptant doit avoir au moins 28 ans.
Si l'adoptant est marié, le consentement de son conjoint est nécessaire. En pratique, il est extrêmement rare qu'une personne mariée veuille adopter seule un enfant, à moins que cet enfant ne soit précisément celui que son conjoint a eu d'une précédente union (Code civil, Art. 343-1).
À noter :
En présence de justes motifs, qu'il lui appartient d'apprécier, le juge peut prononcer une adoption, même si la condition de différence d'âge entre l'adoptant et l'adopté n'est pas remplie (Code civil, Art. 344).
À noter :
En l'état actuel de la jurisprudence française, une personne seule qui désire adopter un enfant se verra refuser l'agrément si elle est homosexuelle. Sollicitée sur cette question, la Cour européenne des droits de l'homme n'a pas jugé que cette jurisprudence était discriminatoire (Cour européenne des droits de l'homme, 26/2/2002). Contrairement à la France, les Pays-Bas, le Danemark, la Suède et plus récemment le Royaume-Uni autorisent l'adoption d'un enfant par les couples de même sexe.
L'adoption par un couple marié
C'est le seul cas où un enfant peut être adopté simultanément par deux personnes: ainsi, l'adoption d'un enfant par deux concubins n'est pas permise, y compris pour les personnes liées par un PACS, qu'elles soient de même sexe ou de sexe opposé.
Les époux doivent être mariés depuis au moins 2 ans ou, à défaut, être âgés l'un et l'autre de plus de 28 ans (Code civil, Art. 343).
Quelles sont les conditions d'âge ?
Cet âge varie selon qu'il s'agit d'une adoption simple ou plénière. Mais dans toutes les hypothèses, si l'enfant a plus de 13 ans il doit consentir personnellement à son adoption.
■ Pour une adoption plénière
L'enfant doit être âgé de moins de 15 ans et doit avoir été accueilli au foyer de l'adoptant depuis au moins 6 mois, ceci afin de vérifier son adaptation à sa nouvelle situation. Seule exception à cette règle, si l'enfant a déjà fait l'objet d'une adoption simple avant ses 15 ans (ou s'il a été accueilli au foyer de personnes qui ne remplissaient pas les conditions pour adopter), il est possible de l'adopter pendant sa minorité et dans les 2 ans suivant sa majorité (Code civil, Art. 345).
■ Pour une adoption simple
Aucune condition d'âge minimum de l'enfant n'est exigée (Code civil, Art. 360).
Quels sont les enfants adoptables ?
Il existe trois catégories d'enfants adoptables :
- ceux dont la famille consent à l'adoption ;
- les pupilles de l'État ;
- les enfants déclarés abandonnés par une décision judiciaire (Code civil, Art. 347).
■ Les enfants dont la famille consent à l'adoption
Que l'enfant soit légitime ou naturel, ses parents doivent l'un et l'autre consentir à l'adoption. Un seul des parents peut consentir à l'adoption si l'enfant n'a de filiation établie qu'à l'égard de celui-là ou bien encore si l'autre parent est décédé ou s'est vu retirer totalement l'autorité parentale.
Si les deux parents sont décédés ou se sont vu retirer totalement l'un et l'autre l'autorité parentale, le consentement est donné par le conseil de famille après avis de la personne qui, en fait, prend soin de l'enfant (Code civil, Art. 348 à 348-2).
Le consentement étant un acte d'une importance évidente, il doit faire l'objet d'un acte authentique (devant le greffier en chef du tribunal d'instance, un notaire, un agent diplomatique ou consulaire français), les adoptants étant désignés dans cet acte.
Le consentement peut également être reçu par les services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) lorsque l'enfant leur a été remis (ces services correspondent à l'ancienne Assistance Publique). En principe, si l'enfant a moins de 2 ans, il doit avoir été remis aux services de l'ASE ou à un organisme autorisé pour l'adoption à moins qu'il n'existe un lien de parenté ou d'alliance jusqu'au 6e degré inclus entre adoptant et adopté. Si l'enfant a été remis aux services de l'ASE ou à un organisme autorisé pour l'adoption, le consentement à l'adoption donné par ses parents ne leur permet pas de choisir l'adoptant car ce choix est laissé au tuteur de l'enfant avec accord du conseil de famille.
Les parents de l'enfant peuvent rétracter leur consentement à l'adoption pendant 2 mois et peuvent encore demander la restitution de leur enfant après ce délai tant qu'il n'a pas été placé en vue de son adoption (Code civil, Art. 348-3 à 348-5).
■ Les pupilles de l'État
Ce sont des enfants intégralement pris en charge par les services de l'ASE et dont la tutelle est assurée par l'État. Ils représentent aujourd'hui la majorité des enfants adoptables.
Parmi les enfants pris en charge par les services de l'ASE, ont seuls la qualité de pupilles de l'État :
- les enfants dont la filiation, tant à l'égard de leur mère que de leur père, n'est pas établie ou est inconnue et qui ont été recueillis par les services de l'ASE depuis plus de 2 mois. Il s'agit le plus souvent d'enfants dont la mère a accouché anonymement (accouchement « sous X ») ;
- les enfants dont la filiation est établie et qui ont été remis aux services de l'ASE en vue de leur admission comme pupille de l'État par les personnes qui ont qualité pour consentir à leur adoption (voir ci-dessus). Si les deux parents ont remis l'enfant, il aura la qualité de pupille de l'État au terme de 2 mois, sauf rétractation des parents pendant ce délai; si un seul des parents a remis l'enfant, il sera immatriculé comme pupille de l'État dès lors que l'autre parent n'aura pas fait connaître, dans le délai de 6 mois, son intention d'en assumer la charge ;
- les enfants orphelins de père et de mère dans l'hypothèse ou la tutelle de droit commun organisée par le juge des tutelles n'est pas possible (absence de proches parents ou impossibilité pour ceux-ci de prendre en charge l'enfant). Dans ce cas, l'enfant confié depuis plus de 2 mois aux services de l'ASE deviendra pupille de l'État ;
- les enfants dont les parents ont fait l'objet d'un retrait total de l'autorité parentale et qui ont été recueillis depuis plus de 2 mois par les services de l'ASE ;
- les enfants qui ont été recueillis par les services de l'ASE à la suite d'une décision judiciaire ayant constaté leur abandon. Cet abandon doit être prononcé par un jugement du tribunal de grande instance et suppose que les parents se sont désintéressés de leur enfant depuis plus de 1 an.
En leur qualité de pupilles de l'État ces enfants sont adoptables et doivent, dans les meilleurs délais, faire l'objet d'un projet d'adoption.
■ Les enfants judiciairement déclarés abandonnés
Il s'agit des enfants recueillis par un particulier, un établissement ou un service de l'ASE dont les parents se sont manifestement désintéressés (absence de relations nécessaires au maintien de liens affectifs) pendant l'année qui précède l'introduction de la demande en déclaration d'abandon auprès du tribunal de grande instance. Ces personnes ou services ont l'obligation, après un désintérêt de plus d'1 an à compter de l'accueil de l'enfant, d'effectuer les démarches pour que soit déclaré l'abandon de l'enfant par ses parents.
Il faut que le désintérêt soit volontaire et constant pendant une année et qu'aucun membre de la famille de l'enfant n'ait souhaité en assumer la charge pour que l'abandon soit déclaré. Inversement, il n'y aura marque d'intérêt que si l'intention des parents est réelle et suivie d'effets.
À la suite de cette décision d'abandon, l'enfant est adoptable sans que ses parents aient à consentir à l'adoption. De plus, s'il s'agit d'un particulier qui avait recueilli l'enfant, il pourra l'adopter sans avoir à obtenir d'agrément, cet enfant n'ayant pas la qualité de pupille de l'État. En attendant cette adoption future, le tribunal délègue les droits d'autorité parentale sur l'enfant à la personne ou l'établissement qui avait recueilli l'enfant (Code civil, Art. 350).